Octave Tassaert, Intérieur d’atelier, musée du Louvre © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre) / Jean-Gilles Berizzi
La bohème c’est d’abord une idée de la marge, une vie précaire parce qu’on y est forcé ou qu’on l’a choisie, mais dans laquelle on retrouve une dignité en assumant une forme d’excentricité, de refus de la société “respectable” ou d’en respecter les règles, on s’y rêve en héros du quotidien pouvant atteindre une forme de “gloire rédemptrice”. C’est cette philosophie de l’existence qui guidera la plus grande partie des avant-gardes artistiques au XIXe siècle, dont l’une des premières figures sera Rimbaud.
Rimbeaud(Ultissima Verba), Lettre de Delahaye à Verlaine, 1878. Bibliotheque Litteraire Jacques Doucet, Paris.(Image tirée du site : www.herodote.net )
On trouvait une dimension décadente dès le romantisme et la volonté pour ses artistes de s’abandonner pleinement à leurs passions au risque de l’autodestruction. Mais les romantiques n’étaient pas du tout des marginaux, au contraire des artistes, poètes et écrivains qui feront avancer l’art de leur temps à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle.
Dans un premier temps, le centre du Paris artistique, dans la continuité de ce romantisme, était le quartier de la Nouvelle Athènes, dans le 9ème arrondissement. Si le quartier n’a jamais été très “populaire”, il s’embourgeoise encore plus : loyers, boissons et prostituées affichent des tarifs de plus en plus prohibitifs, obligeant ses artistes, ceux en dehors des académies ou des normes littéraires conventionnelles et qui ne pouvaient donc vivre de leur art, à trouver une nouvelle terre d’asile : Montmartre.
Le quartier est alors comme un village isolé dans Paris, correspondant bien à leur idée de la marge, et les tarifs modiques des “produits de consommation courante” de la vie d’un artiste d’alors en feront très vite un lieu de fête, dans des nuits sans fin où l’alcool peut couler à flot sans crainte de ne pouvoir payer son loyer. En plus d’une vie bien moins chère qu’ailleurs dans la ville, poètes comme peintres peuvent trouver, dans ses paysages d’une campagne encore préservée, une inspiration.
Pissaro, Van Gogh, Toulouse-Lautrec, puis à leur suite Braque, Modigliani, Matisse et bien sûr Picasso seront, parmi bien d’autres, les bientôt célèbres habitants des lieux, croisés aussi bien dans leur atelier et résidence comme le Bateau Lavoir, que dans les cafés et cabarets dont les noms resteront dans la postérité, comme le Lapin Agile et le Chat Noir, lieux de débauche et de canaille.
Mais cette vie bohème ne durera pas pour tous. Ces artistes avant-gardistes, se vivant marginaux, vont en réalité très vite rencontrer leur temps. Picasso, Matisse, Braque, vont commencer à vendre, et même beaucoup. C’est que le monde de l’art est en ébullition et pas seulement à Montmartre, ailleurs dans Paris d’autres foyers d’avant-gardes apparaissent, comme La Ruche à Montparnasse, qui est l’équivalent pour ce quartier du Bateau Lavoir. Les marginaux sont plus nombreux qu’ils l’auraient pensé, leur influence dans la pensée de l’art s’est révélée vite explosive. Alors, embourgeoisés, loin des rêves de “gloire rédemptrice” dans la mort, ils déménagent, fréquentent davantage des quartiers comme ceux du 15ème ou du 14ème arrondissement, insérés et acceptés dans la société.
La 1ère guerre mondiale achèvera de mettre fin à la bohème montmartroise. A l’issue de la guerre, les artistes, fidèles à ce propos au nomadisme de la vie bohème, changeront encore de foyer : ce sera, particulièrement, le quartier bien plus bourgeois de Montparnasse. Mais la fête, les excès, l’alcool, continueront de se vivre pleinement dans ces années d’entre les deux guerres qu’on appellera les “années folles”, années du surréalisme et de la consécration des artistes modernes, toujours excentriques, mais définitivement sortis de la marge.
KIM Bora
Sources :
Wikipedia :
Sources divers :
- Site officiel de « La Réunion des musées nationaux – Grand Palais » , La Bohème, un Mythe?, écrit le 19 octobre 2012 par Armelle Fémelat : http://www.grandpalais.fr/fr/article/la-boheme-un-mythe
- Site de l’Association Terres d’écrivains, La Bohème littéraire à Paris, écrit le 19 janvier 2007 : http://www.terresdecrivains.com/La-boheme-litteraire-a-Paris
- Site d’Art-Histoire-Littérature, Le contexte artistique à la veille de la grande guerre, écrit par Anne-Maya Guérin : http://art-histoire-litterature.over-blog.com/2015/02/le-contexte-artistique-a-la-veille-de-la-grande-guerre-paris.htm
- Site de Blog Raconte-moi l’histoire, Une histoire du Bateau-lavoir à Montmartre : http://www.racontemoilhistoire.com/2015/10/03/histoire-du-bateau-lavoir-montmartre
- Site de Culture 13, Autour du Bateua-Lavoir. Des artistes à Montmartre (1892-1930) et la Méditerranée, article sur l’exposition en 2014 : http://www.culture-13.fr/agenda/autour-du-bateau-lavoir-des-artistes-a-montmartre-1892-1930-et-la-mediterranee.html
Médias :